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Tour d’horizon sur les achats de prestations intellectuelles : se prémunir contre les risques liés aux achats de prestations

L’achat de prestations intellectuelles est parfois externalisé par le biais de la sous-traitance ou en faisant appel à un auto-entrepreneur par exemple. En effet, l’externalisation présente plusieurs avantages dont celui de pouvoir faire varier les coûts d’une entreprise.

Que ce soit par une opération de sous-traitance ou par l’intervention d’un auto-entrepreneur, l’achat de prestations intellectuelles peut cependant présenter des risques.

Aussi, l’achat de prestations intellectuelles peut donner lieu à des situations de prêt illicite de main-d’œuvre si elles ne sont pas convenablement gérées.

Il est cependant possible de prendre toutes les précautions juridiques afin de se prémunir contre ces situations illicites. Voyons concrètement les règles à mettre en place pour réaliser l’achat de prestation intellectuelles en toute sécurité.

homme réfléchissant devant son ordinateur

Qu’est-ce qu’une prestation intellectuelle ?

Le vocable “prestations intellectuelles” réunit les prestations réalisées sans fourniture de matériel puisque ce sont les compétences et le savoir-faire d’une personne physique qui sont exploités pour rendre ce type de prestation.

Une prestation est intellectuelle dès lors que la part de réflexion est supérieure à la part de service.

Ces prestations intellectuelles donnent souvent lieu au prêt de main-d’œuvre entre entreprises sans besoin d’outils, matériel ou équipement.

Le cadre légal du prêt de main-d’œuvre pour l’achat des prestations intellectuelles

Le prêt de main-d’œuvre pour l’achat des prestations intellectuelles doit être réalisé dans un cadre légal précis. Aussi, la loi prévoit des cas spécifiques autorisant les entreprises à avoir recours au prêt de main-d’œuvre.

Il s’agit de la situation dans laquelle une entreprise prête une partie de son personnel à une autre entreprise pour des missions précises et temporaires notamment en raison d’une carence de compétences en interne. Ce prêt de main-d’œuvre est licite à condition que :

  • Le prêt de main-d’œuvre soit à but non lucratif pour l’entreprise prêteuse.
  • L’entreprise prêteuse doit uniquement facturer à l’entreprise utilisatrice les salaires versés aux salariés, les charges sociales qui y sont liées et les frais professionnels remboursés au salarié.

Il existe cependant 3 exceptions autorisant une opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’œuvre :

  • Le travail temporaire par les agences d’intérim
  • Le portage salarial pour les entreprises de travail à temps partagé
  • Les agences de mannequin par le titulaire de la licence d’agence de mannequin

(article L8241-1 du Code du travail).

Savoir éviter les risques pénaux liés aux achats de prestations intellectuelles auprès d’un prestataire indépendant

Comprendre le délit de marchandage et le prêt illicite de main d’œuvre

Deux principaux risques pénaux menacent l’achat de prestations intellectuelles : le délit de marchandage et le prêt de main-d’œuvre illicite.

Pour mémoire, le délit de prêt de main-d’œuvre illicite est la situation dans laquelle une “opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’œuvre ” est mise en place (article L. 8241-1 du Code du travail).

Le délit de marchandage se définit quant à lui comme une “opération à but lucratif de fourniture de main d’œuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail ” (article L. 8231-1 du Code du travail).

Pour illustrer ces deux infractions, prenons l’exemple d’une entreprise qui ferait appel à un développeur web, en imposant au prestataire des horaires, des directives précises et dont les missions seraient réalisées grâce au matériel de l’entreprise. Dans ce cas, la jurisprudence considère que l’entreprise prend le risque de commettre les délits de marchandage et de prêt de main-d’œuvre illicite.

L’entreprise à l’initiative des achats de prestations intellectuelles, doit donc être vigilante à ne pas appliquer à ses ressources externes les conditions de travail internes à l’entreprise. Dans le cas contraire, il y a un transfert du lien de subordination juridique qui peut caractériser le délit de marchandage et le prêt de main – d’œuvre illicite.

La question de la dépendance économique

Il existe un autre risque qui est la dépendance économique du prestataire indépendant.

Il s’agit, selon les termes de la jurisprudence, de “ l’impossibilité de substituer à son donneur d’ordre un ou plusieurs autres donneurs d’ordres, lui permettant de fonctionner dans des conditions techniques et économiques comparables.” (Cour de cassation chambre commerciale 12 février 2013 N° de pourvoi : 12-13603).

Les entreprises qui externalisent ont ainsi toujours intérêt à vérifier que leur prestataire demeure libre de diversifier sa clientèle et qu’il n’en est pas empêché par des clauses illicites au contrat commercial ou par un comportement dominant de l’entreprise cliente.

A défaut, l’entreprise se rapproche dangereusement de la dépendance économique pouvant révéler l’existence d’un lien de subordination entraînant l’infraction de travail dissimulé.

Savoir éviter les risques pénaux liés aux achats de prestations intellectuelles dans le cadre d’un contrat de sous-traitance

Les dispositions de l’article L 8241-2 du Code du travail exposent les conditions dans lesquelles il est possible d’avoir recours au prêt licite de main-d’œuvre.

Demander l’accord du salarié et formaliser l’accord

Pour que le prêt de main-d’œuvre soit licite, l’accord du salarié prêté est indispensable. Aussi, l’entreprise prêteuse doit faire un avenant au contrat de travail du salarié, précisant le travail confié dans l’entreprise utilisatrice, les horaires et le lieu d’exécution du travail, ainsi que les caractéristiques particulières du poste de travail. Le salarié doit donner son accord en signant cet avenant.

Au terme du prêt de main-d’œuvre, le salarié revient dans son entreprise d’origine, sans que l’évolution de sa carrière ou de sa rémunération ne soit affectée par la période de prêt.

Néanmoins, le salarié prêté peut refuser la mise à disposition demandée par son employeur et il ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir refusé une proposition de mise à disposition.

Mettre en place une convention de mise à disposition

L’entreprise prêteuse et l’entreprise utilisatrice doivent veiller à mettre en place une convention de mise à disposition définissant :

  • la durée
  • l’identité
  • la qualification du salarié
  • le mode de détermination des salaires,
  • des charges sociales et des frais professionnels qui seront facturés à l’entreprise utilisatrice.

Maintenir le lien de subordination juridique avec l’entreprise prêteuse

Le salarié prêté continue d’appartenir au personnel de l’entreprise prêteuse. En effet, durant la période de prêt de main-d’œuvre, le contrat de travail qui lie le salarié à l’entreprise prêteuse n’est ni rompu ni suspendu.

C’est généralement le constat d’un “ transfert du lien de subordination juridique ” entre les entreprises qui va permettre au juge de qualifier le prêt de main-d’œuvre d’illicite et de délit de marchandage.

Dans ce sens, la jurisprudence a rappelé que lorsque le client exerce une certaine autorité sur les salariés du prestataire (directives données au salarié, contrôle des horaires de travail etc) le délit de marchandage est constitué (Cass. crim., 3 mai 1994, n° 93-83.104 ; Cass. crim., 22 oct. 1996, n° 96-80.194).

Informer le CSE de l’entreprise

Le comité social et économique (CSE) de l’entreprise prêteuse doit être consulté avant la mise en œuvre du prêt de main d’œuvre.

Les sanctions du délit de marchandage et prêt illicite de main-d’œuvre

Ces délits entraînent la qualification d’une autre infraction qui en découle : le travail dissimulé puni d’un emprisonnement de 3 ans et d’une amende de 45 000 euros. En cas d’emploi dissimulé d’un mineur soumis à l’obligation scolaire, les peines encourues sont de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende (article L8224-1 et article L8224-2 Code du travail).

Les risques liés aux achats de prestations intellectuelles sont maîtrisables dès lors que les entreprises acheteuses portent leur attention sur les conditions de l’externalisation. Les dispositions du Code du travail ont par ailleurs un caractère obligatoire, les entreprises ne peuvent donc déroger à ces règles dès lors qu’elles entrent dans leur champ d’application.

Textes de référence :

  • article L. 8241-1 du Code du travail
  • article L. 8231-1 du Code du travail
  • article L. 8221-5 du Code du travail
  • article L. 8222-1 du Code du travail
  • Cour de cassation chambre commerciale 12 février 2013 N° de pourvoi : 12-13603

J’ai à cœur d’accompagner les entreprises dans le succès d’un écosystème de compétences externes, en garantissant le respect réglementaire qui nous est tous imposé. Je m’engage donc à participer à des manifestations qui nous permettrons de construire en co-développement les bonnes pratiques de demain.

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